LA NOMENKLATURA CANADIENNE

 



Surgi des profondeurs du passé, un monstre redoutable, cynique et sans scrupule, menace le Canada d'une destruction assurée, par mille blessures sanglantes.

Née en 1867, cette hydre innommable, abominable et détestable, aux cent tentacules toujours renouvelées, est la matrice infernale dont sont issues plusieurs figures connues de l'histoire du royaume britannique qu'est le Canada, ce royaume qui décline toujours mais ne meurt jamais réellement, un peu comme l'empire britannique, en général, d'ailleurs, c'est-à-dire Wilfrid Laurier, Mackenzie King, Louis Saint-Laurent, Pierre-Elliott Trudeau, Jean Chrétien, Justin Trudeau et combien d'autres.

Honni soit qui mal y pense.

Honni soit qui bien en pense.

Honni soit-il, celui qui souhaite continuer d'en faire partie.

Cette hydre aux cent tentacules compte près de 400 000 membres, pour un pays de plus de 40 millions d'habitants. C'est donc dire qu'il regroupe pas loin de 1 % de la population canadienne. Cela semble peu, mais c'est beaucoup, c'est même beaucoup trop, en fait car ces membres sont partout et ils sont puissants, influents, riches et affamés de pouvoir, tout en étant remarquablement peu scrupuleux et prêts à tout pour ne pas perdre leur emprise sur cet infortuné royaume au destin incertain.

Prêts à tout, ils le sont, assez pour mener des campagnes de peur et d'effroi, comme lors du premier référendum québécois, celui de 1980, avec notamment le coup de la Brinks, de sinistre mémoire, ainsi que des manipulations financières peu ragoûtantes et nauséabondes, comme lors du deuxième référendum québécois, celui de 1995, un exercice démocratique ayant fait l'objet de manoeuvres douteuses de la part du gouvernement fédéral, afin de favoriser indûment le comité du Non, tout en ayant été précédé du noyautage préalable de plusieurs quotidiens et hebdomadaires d'expression française, au Québec et hors Québec, afin d'assurer de bien contrôler l'information politique circulant dans la sphère médiatique francophone, à l'origine du bourrage de crânes qui s'en est ensuivi.

Il y a plus, malheureusement: l'hydre canadienne, dans ses différentes manifestations, fait irrésistiblement penser à la fameuse nomenklatura soviétique d'une autre époque, une entité puissante, infuente, omniprésente, vénale, corrompue, attirée par les biens matériels et les idées faciles, les coups fourrés et les entourloupettes, une créature sans âme, sans vergogne, sans scrupule et sans principe.

La multiplicité fait sa force. Les membres qui oeuvrent en politique active, dans l'une ou l'autre des chambres du Parlement, sont au service des membres qui oeuvrent dans le monde des affaires et travaillent de concert avec eux, pour leur plus grand bénéfice commun, s'enrichissant mutuellement sur le dos de l'ensemble de la population, tout en étant aussi au service de la monarchie britannique, par l'intermédiaire du Gouverneur-Général et des lieutenants-gouverneurs des provinces et des territoires.

La nomenklatura canadienne est habile depuis sa naissance et se maintient au pouvoir de toutes les façons possibles. Elle a appris au fil du temps que la meilleure manière de gagner des élections est de faire à l'électorat des promesses alléchantes, bien qu'irresponsables, et de les réaliser une fois au pouvoir, sans se préoccuper du fait que cela génère des déficits annuels gonflant la dette fédérale, année après année, et entraînant du coup la nécessité d'éponger cette dette au fur et à mesure par la vente d'obligations, dont le remboursement en capital et en intérêt se fait par l'entremise de l'impôt versé par l'ensemble des contribuables, particuliers comme corporatifs, sur de longues périodes, permettant ainsi un transfert graduel de richesse, de l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes vers ces acheteurs d'obligations, lesquels proviennent habituellement des franges les plus aisées de la population, là où se trouvent justement la plupart des membres de l'hydre en question!

On voit bien qu'il y a ici un système qui profite à certains plus qu'à d'autres. Les immigrants ne s'y trompent pas et devinent rapidement comment les choses fonctionnent au Canada. On s'en rend compte à Ottawa, par exemple, la capitale canadienne. Celle-ci compte des dizaines de milliers d'immigrants, dont plusieurs travaillent directement pour le gouvernement fédéral ou des entités fédérales. Nombre d'entre eux ont décidé de devenir membres de l'hydre canadienne, afin d'assurer leur avenir professionnel, ce qui est évidemment compréhensible. En tant que membres juniors de la nomenklatura canadienne, ils sont ainsi, souvent, appelés à travailler sous la supervision d'autres membres oeuvrant dans les strates inférieures de l'administration fédérale, lesquels sont souvent au service d'autres membres oeuvrant dans les strates intermédiaires, lesquels sont souvent au service d'autres membres oeuvrant dans les strates supérieures, lesquels sont souvent au service d'autres membres oeuvrant au niveau politique, dans l'une ou l'autre des chambres du Parlement, lesquels sont souvent au service d'autres membres oeuvrant dans le monde des affaires.

L'arbre est dans ses feuilles, dit-on souvent en Louisiane. C'est également vrai au royaume canadien, le pays des énormes bancs de neige, des aurores boréales et des températures frigorifiantes en hiver, le pays où il ne fait pas bon de se retrouver sans domicile fixe lorsque le thermomètre indique moins quarante degrés Celsius, en janvier ou en février, une contrée apparemment au-dessus de tout soupçon, du moins aux yeux du reste du monde, telle la Suisse zieglerienne.

La nomenklatura canadienne n'est pas au-dessous de tout soupçon, elle non plus, même si elle semble souvent en mesure de résister impunément à ses propres turpitudes. On l'a bien vu lors du scandale des commandites, il y a plusieurs années, dans la foulée du deuxième référendum québécois, alors que les relations troubles et malodorantes entre les membres politiques de l'hydre fédérale et les membres économiques de sa petite cousine provinciale étaient étalées au grand jour et donnaient l'impression que ni l'hydre fédérale, ni l'hydre provinciale ne pourrait s'en réchapper au yeux du grand public. Cette impression était visiblement sans fondement, vu que la première est actuellement au pouvoir à Ottawa, alors que la seconde forme présentement l'opposition officielle à Québec.

Sera-t-il possible de venir à bout un jour de l'hydre fédérale, cette pieuvre qui étrangle le Canada depuis sa création et pompe son sang depuis des décennies, par le biais des déficits qu'elle multiplie à Ottawa depuis les années 80? La question est posée et ne sera peut-être répondue que lors d'un hypothétique troisième référendum, encore dans les limbes.

Il y a en effet un curieux appariemment entre le comportement de la nomenklatura canadienne et le mouvement indépendantiste québécois. Ils semblent indissociablement liés depuis le milieu du XXe siècle, dans une sorte de conflit existentiel touchant la nature même du royaume canadien, une entitée qui résulte du transfert forcé de deux ex-colonies françaises, le Canada et l'Acadie, du royaume de France au royaume d'Angleterre, suite aux bouleversements  survenus lors de la guerre de Sept-Ans.

La première défaite référendaire, celle de 1980, suite aux campagnes de peur menées par le gouveernement fédéral, a été à la source de l'adoption subséquente de la Constitution canadienne, entérinée par toutes les provinces, à l'exception notable du Québec. Les premiers déficits ont commencé plus ou moins au même moment. Plus tard, après le vol éhonté du référendum de 1995, les déficits se sont encore accrus et multipliés, un peu comme si l'appétit de l'hydre était inversement proportionnel à sa peur de disparaître. Lorsque son assurance augmente, son appétit s'accroît et les déficits fédéraux s'approfondissent, tout comme la dette totale qui en résulte.

Il semble bien, donc, que le scénario idéal, pour tout le monde, sauf pour les membres eux-mêmes de la nomenklatura canadienne, bien entendu, soit que cette abomination finisse par disparaître un jour, une bonne fois pour toutes, d'une manière ou d'une autre. C'est probablement la seule façon d'assurer l'avenir du Canada, tout comme celui du Québec, quelle que soit la forme que prendra un jour la relation entre ces deux entités politiques incontournables.


''L'arbre est dans ses feuilles, marilon, marilé,
L'arbre est dans ses feuilles, marilon don dé...''


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