UNE PROPOSITION POUR LE BÉNIN

 

Tout au sud du Bénin, la métropole économique, Cotonou, s'étale sur une longue surface plate et sableuse, formée de terre de barre, dessinant un genre d'isthme entre les fortes vagues de l'océan Atlantique et les eaux bien plus calmes du lac Nokoué, un vaste plan d'eau juste au nord. Au nord-est, la ville de Porto-Novo se trouve au centre d'un vase réseau lagunaire qui s'étire sur des dizaines de kilomètres, entre Cotonou et Lagos, la plus grande ville du Nigéria. Porto-Novo est la capitale de la république du Bénin, plus précisément sa capitale officielle, car plusieurs ministères logent en fait à Cotonou, tout comme le siège de la présidence. Porto-Novo forme avec Cotonou une conurbation urbaine en pleine expansion. Pour sa part, Abomey-Calavi est un ancien centre administratif d'Abomey, la capitale du royaume pré-colonial du Dahomey), ainsi que le siège de l'Université d'Abomey-Calavi. Située juste au nord-ouest de Cotonou et faisant elle aussi partie de sa conurbation de Cotonou, Abomey-Calavi héberge aussi le nouveau parc industriel de Glo-Djigbé, en plein développement. Ce complexe devrait compter, d'ici quelques années, des centaines d'entreprises et près de 300 000 emplois. Par ailleurs, un peu à l'ouest de Cotonou, avec laquelle elle se fond de plus en plus, se trouve la ville de Ouidah, site historique et touristique de premier plan, notamment pour son rôle dans la traite des esclaves. Au centre du pays, on retrouve Parakou, ville qui sert depuis plusieurs années de centre administratif pour la partie nord du Bénin et dont la vocation est de desservir les habitants de cette zone. Parakou est aussi un centre industriel, militaire et administratif, en plus d'être le siège de l'Université de Parakou. Malanville, pour sa part, se trouve à l'extrémité nord du Bénin, sur les rives du fleuve Niger, principal cours d'eau d'Afrique de l'Ouest et frontière naturelle pour démarquer le territoire de la République béninoise de celui de la République nigérienne.

 

 

Depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale et le début de la décolonisation, plusieurs des nouveaux pays réarrangent souvent leur structure administrative pour mieux refléter leur réalité démographique et politique.

Ce ne sont pas les exemples qui manquent. Un cas fameux est celui du Brésil, avec Brasilia, fichée délibérément à l'intérieur du pays, loin des côtes. L'Indonésie s'apprête à faire de même, avec une future capitale en construction dans l'est de l'île de Bornéo. La capitale actuelle, Djakarta est jugée trop congestionnée et une partie de son site a tendance à s'enfoncer. Le Nigéria, pour sa part, a décidé de délaisser la ville tentaculaire de Lagos pour aller installer sa capitale à Abuja, au cœur géographique de ce pays, le plus populeux d'Afrique.

L'exemple du Nigéria est intéressant, car il pourrait servir de modèle au Bénin, petite république qui se trouve juste à l'ouest. Présentement, la capitale est Porto-Novo, fait partie d'une vaste conurbation urbaine comprenant aussi la métropole économique de Cotonou, le centre universitaire et industriel d'Abomey-Calavi et le centre historique et touristique de Ouidah. L'ensemble ainsi constitué représente une agglomération importante, bien qu'un peu excentrée, se trouvant à l'extrémité sud du pays, là où la France avait concentré l'essentiel de l'administration coloniale.

Dans une démarche visant à rééquilibrer les choses et mieux desservir le centre et le nord du pays, le gouvernement béninois a entrepris, il y a quelques décennies, de déployer de grands efforts pour transformer la ville de Parakou, au cœur du territoire béninois, de façon à en faire un centre administratif destiné à desservir les populations du centre et du nord du pays. La ville de Parakou présente aussi l'avantage d'être le terminus d'une voie ferrée la reliant à Cotonou et pouvant éventuellement être prolongée jusqu'à Nyamey, la capitale et principale ville de la république du Niger. Aujourd'hui, à la suite de ces initiatives, on trouve à Parakou, entre autres, un grand nombre d'installations gouvernementales, commerciales, universitaires, logistiques, industrielles, militaires, etc.

Dans la foulée du Nigéria, avec la création d'Abuja, mais aussi de la Côte d'Ivoire, avec la création de Yamassoukro, il est permis de concevoir la possibilité, pour le Bénin, de pousser sa démarche encore un peu plus loin, dans une optique de changements graduels, sur un horizon de plusieurs décennies. Un tel projet pourrait permettre de solidifier les liens entre le secteur sud et le secteur nord du Bénin, assez dissemblables, tout en s'assurant de desservir au mieux la population dans l'ensemble du pays.

Le projet envisagé comporterait ainsi trois grands volets:

  1. Conserver l'essentiel des effectifs gouvernementaux dans la populeuse conurbation urbaine de Cotonou, cœur du pays, tout en désignant Porto-Novo comme centre administratif pour le Sud Bénin;
  2. Faire de Parakou la capitale officielle du Bénin, modifier son statut pour en faire un centre administratif pour le Centre Bénin et mettre en place une série de fonctions centrales prestigieuses (bibliothèque, archives, musées, etc.);
  3. Accorder à Malanville, une ville située tout au nord du pays, sur le Niger, le statut de centre administratif pour le Nord Bénin, tout en y implantant des installations logistiques, commerciales, industrielles et militaires, découlant de sa position stratégique intéressante, aux abords du Niger voisin.

La réalisation d'une telle proposition n'est pas pour demain, bien sûr. Elle ne saurait se réaliser que dans le cadre d'une démarche d'envergure, comprenant une prise de conscience au sein de la société béninoise, une réflexion approfondie de la part des milieux gouvernementaux, une capacité financière suffisante pour assumer les coûts afférents à un tel projet, un assentiment final du peuple béninois avant de débuter quoi que ce soit sur le terrain.

Au final, il est important de souligner que le Bénin, bien sûr, appartient aux Béninois et aux Béninoises. C'est uniquement à eux et à elles qu'il revient de pouvoir estimer la viabilité et l'utilité d'un tel projet et de juger s'il vaut la peine d'être entrepris.

Comme en bien d'autres choses, l'auteur se contente ici de semer des graines dans le sol et de voir si elles pousseront ou non, un peu à l'image du vieil homme à la retraite qui consacre ses dernières années à favoriser la renaissance d'une vallée de Haute-Provence, tel qu'illustré dans le fameux conte L'homme qui plantait des arbres, basé sur une histoire de Jean Giono.

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PLUS:  @charles.millar3 (Twitter)













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