COLONIES ET PROTECTORATS

 

Carte montrant l'Empire directement administré par la dynastie Tang (en rose foncé), en Asie, ainsi que les nombreux protectorats de cet empire (divers territoires environnants, en Asie centrale, Mongolie et Mandchourie, ainsi que dans l'Indochine atuelle). Taiwan, incidemment, à cette époque, est encore occupée par les Formosans, ancêtres des Austronésiens, les populations chinoises de la province du Fukien n'ayant pas encore commencé à traverser le détroit pour s'installer sur cette île relativement peu peuplée, probablement en vue d'échapper aux impôts impériaux et y vivre de pêche et d'agriculture. L'administration impériale a éventuellement réincorporé ces familles enfuies en agrandissant le territoire du Fukien de manière à englober l'ensemble de l'île. La création d'une province centrée sur l'ile et dénommée Taiwan a eu lieu à un moment ultérieur. (Carte: Wikipedia.)


Carte montrant les protectorats et colonies du Maroc de l'époque coloniale. On distingue ici une différence entre le territoire national d'un pays colonisateur, par l'exemple, l'Espagne, ses colonies et ses protectorats. L'Espagne actuelle comprend entre autres l'Andalousie, les villes africaines de Ceuta et Mellila, plus de petits îlets et péninsules au nord du Rif. Les colonies du Sahara espagnol comprennaient deux unités administratives distinctes et contigues (en rouge foncé), auxquelles il faut adjoindre le petit territoire colonial d'Ifni. Les protectorats espagnols apparaissent sur cette carte, au nombre de deux, en rose pâle, soit les territoires identifiés comme le Cap Juby et le Rif, respectivement au nord et au sud du royaume chérifien d'alors (vert pâle), dont ils relèvent au plan administratif. Ce royaume chérifien, pour sa part, lui-même placé sous le protectorat de la France, côtoyait l'Algérie française à l'est (en vert foncé), une colonie de peuplement comptant au plus fort de l'implantation de nombreuses populations venues d'Europe (d'origine française, mais aussi espagnole et italienne), au nombre d'environ un million de personnes, contre neuf millions de personnes pour les populations musulmanes d'origine berbère et arabe. Au sud, se trouvait une autre colonie de la France, mais celle-là sans implantation européenne majeure, soit la Mauritanie française, composée de peuples arabes et arabisés, ainsi que de plusieurs peuples noirs (le long d'une bande de territoire située au nord du fleuve Sénégal). La pointe nord (et très désertique) d'une autre colonie de la France en terre africaine, le Mali français, apparaît au sud-est de la carte. (Source: Wikipedia.)



Le Vietnam, comme la Birmanie, était un genre de protectorat de la Chine impériale, tout comme le Maroc, plus précisément le royaume chérifien du Maroc, était un protectorat de la France à l'époque coloniale. À la fin de cette époque, le royaume a simplement repris les pouvoirs qu'il avait délégué à la République française, au plan de la représentation diplomatique et de la défense nationale, ayant conservé tous les autres aspects de la gérance administrative de son territoire. Cela souligne que les attributs essentiels et incontournables de la souveraineté nationale demeurent la représentation extérieure (Affaires étrangères) et la défense du territoire (Défense nationale). En d'autes mots, les deux séries de pouvoirs en question définissent les relations entre une entité politique (qu'elle soit souveraine ou non souveraine) et les entités politiques souveraines qui composent son environnement.

Le cas du Maroc et de l'Algérie sont très dissemblables. La majeure partie du Maroc actuel était un protectorat français, le reste étant enssentiellement composé de colonies et de protectorats espagnols. L'Algérie française, par contre, était perçue et organisée comme une colonie de peuplement. L'implantation française, débutant en 1830, avec la conquête militaire de ce territoire sur l'Empire ottoman, visait un enracinement à long terme, la preuve étant le grand nombre d'Européens affectés à des activités agricoles, culture de la vigne et d'autres plantes nécessitant des soins s'étalant sur le long terme. Les Européens vivant dans les villes d'Algérie étaient nombreux, eux aussi, mais les populations urbaines sont par nature mobiles et fluctuantes, souvent composées de marchands, d'employés, d'artisans ou d'ouvriers pouvant être relocalisés relativement facilement. Par comparaison, on ne peut par relocaliser en quelques semaines seulement, voire en quelques mois ou années, un champ cultivé s'étendant sur des milliers d'hectares. Les agriculteurs comme tels peuvent être relocalisés (et nombreux sont les Pieds-Noirs qui ont dû refaire leur vie en Corse, par exemple), mais leur outil de production est par définition non transportable. C'est ce qui expliqu que les populations rurales sont habituellement moins volatiles et plus stables que les populations urbaines.

Le même phénomène s'observe lors de l'implantation de la France en terre américaine. La Nouvelle France était simplement le prolongement nord-américain du royaume français, avec une population placée sous administration civile et sous protection militaire. Pour le dire autrement, la partie du royaume français située en Europe était bien plus peuplée, mais bien moins vaste, que la partie du royaume située en Amérique du Nord. Trois colonies de peuplement ont été implantées graduellement, d'abord l'Acadie, puis le Canada et, enfin, la Louisiane, reliées entre elles par des territoires placés sous protectorats, négociés entre les peuples amérindiens et les explorateurs français. Au moment de la Conquête, vers 1759, des embryons de colonies de peuplement commençaient aussi à se développer en d'autres points, comme au pays des Illinois ou autour du secteur du Détroit séparant le lac des Hurons (Huron Lake) et le lac des Ériés (Erie Lake), dans la zone des Grands lacs, véritable château d'eau du continent nord-américain et carrefour d'un grand nombre de voies de communication pouvant être empruntés par des embarcations de toutes sortes.

Incidemment, il est bon de savoir que le lac des Hurons et le lac des Michigans sont exactement au même niveau et ne forment donc, en réalité, qu'une seul plan d'eau, malgré sa double dénomination. Pour sa part, le lac Supérieur, nommé ainsi non parce qu'il est le plus grand, le plus nordique ou le plus profond des Grands lacs, mais simplement parce qu'il est le plus élevé de ceux-ci en matière d'altitude, domine de haut tout le bassin hydrographique du fleuve Saint-Laurent.

Le système des protectorats s'est aussi prolongé lors de la colonisation européenne en Afrique subsaharienne, mais d'une façon transitoire. Dans le cas du Bénin, par exemple, les premiers établissements français résultaient d'entente avec le royaume des Popos (secteur de Grand-Popo, à distinguer du secteur de Petit-Popo, ancien nom de la ville d'Anecho, au Togo allemand, puis au Togo français, puis au Togo indépendant) et avec le royaume de Porto-Novi, la capitale actuelle du Bénin. Les Français disposaient aussi d'un fort à Ouidah, principal port de traite du royaume du Dahomée, et d'un comptoir implanté là où se trouve actuellement la métropole économique de Cotonou. À ces établissements, est venu ultérieurement s'ajouter le territoire relativement vaste du royaume du Dahomée, à la suite de deux difficiles guerres coloniales.Par la suite, l'implantation française a essentiellement pris la forme de la création d'une série de traités de protectorats, négociés à la pièce avec tous les royaumes africains, petits et grands, se trouvant alors entre le sud du Bénin et le fleuve Niger, par le biais d'expéditions partant de la base fluviale de Carnotville, sur le fleuve Ouémé. À l'époque, chaque tribu, aussi minuscule soit-elle, constituait un royaume comme tel, avec une famille royale, une cour, une armée, une langue, une culture, un ensemble complet de traditions de toutes sortes, que ce soit au niveau de la façon de manger, de s'abriter, de se vêtir, etc. Éventuellement, tous ces protectorats ont été fondus et transformés par la création d'entités relativement vastes, sous le nom de colonies, divisées elles-mêmes en cercles et regroupées entre elles (dans le cas spécifique du Bénin) sous le nom d'Afrique occidentale française. Il y avait aussi une Afrique équatoriale française et deux territoires sous mandat, correspondant aux anciennes colonies allemandes du Togo et du Cameroun, réparties entre la France et le Royaume-Uni.

Comme quoi rien n'est jamais simple...


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https://thediplomat.com/2023/08/did-china-colonize-vietnam/



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PLUS:  @charles.millar3 (Twitter)



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