COLONIES ET PROTECTORATS
Carte
montrant les protectorats et colonies du Maroc de l'époque coloniale. On
distingue ici une différence entre le territoire national d'un pays
colonisateur, par l'exemple, l'Espagne, ses colonies et ses protectorats.
L'Espagne actuelle comprend entre autres l'Andalousie, les villes africaines de
Ceuta et Melilla, plus de petits îlets et péninsules au nord du Rif. Les
colonies du Sahara espagnol comprenaient deux unités administratives distinctes
et contiguës (en rouge foncé), auxquelles il faut adjoindre le petit territoire
colonial d'Ifni. Les protectorats espagnols apparaissent sur cette carte, au
nombre de deux, en rose pâle, soit les territoires identifiés comme le Cap Juby
et le Rif, respectivement au nord et au sud du royaume chérifien d'alors (vert
pâle), dont ils relèvent au plan administratif. Ce royaume chérifien, pour sa
part, lui-même placé sous le protectorat de la France, côtoyait l'Algérie
française à l'est (en vert foncé), une colonie de peuplement comptant au plus
fort de l'implantation de nombreuses populations venues d'Europe (d'origine
française, mais aussi espagnole et italienne), au nombre d'environ un million
de personnes, contre neuf millions de personnes pour les populations musulmanes
d'origine berbère et arabe. Au sud, se trouvait une autre colonie de la France,
mais celle-là sans implantation européenne majeure, soit la Mauritanie
française, composée de peuples arabes et arabisés, ainsi que de plusieurs
peuples noirs (le long d'une bande de territoire située au nord du fleuve
Sénégal). La pointe nord (et très désertique) d'une autre colonie de la France
en terre africaine, le Mali français, apparaît au sud-est de la carte. (Source:
Wikipedia.)
Le Vietnam, comme la Birmanie, était un genre de
protectorat de la Chine impériale, tout comme le Maroc, plus précisément le
royaume chérifien du Maroc, était un protectorat de la France à l'époque
coloniale. À la fin de cette époque, le royaume a simplement repris les
pouvoirs qu'il avait délégué à la République française, au plan de la
représentation diplomatique et de la défense nationale, ayant conservé tous les
autres aspects de la gérance administrative de son territoire. Cela souligne
que les attributs essentiels et incontournables de la souveraineté nationale
demeurent la représentation extérieure (Affaires étrangères) et la défense du
territoire (Défense nationale). En d'autres mots, les deux séries de pouvoirs
en question définissent les relations entre une entité politique (qu'elle soit
souveraine ou non souveraine) et les entités politiques souveraines qui
composent son environnement.
Le cas du Maroc et de l'Algérie sont très
dissemblables. La majeure partie du Maroc actuel était un protectorat français,
le reste étant essentiellement composé de colonies et de protectorats
espagnols. L'Algérie française, en revanche, était perçue et organisée comme
une colonie de peuplement. L'implantation française, débutant en 1830, avec la
conquête militaire de ce territoire sur l'Empire ottoman, visait un
enracinement à long terme, la preuve étant le grand nombre d'Européens affectés
à des activités agricoles, culture de la vigne et d'autres plantes nécessitant
des soins s'étalant sur le long terme. Les Européens vivant dans les villes
d'Algérie étaient nombreux, eux aussi, mais les populations urbaines sont par
nature mobiles et fluctuantes, souvent composées de marchands, d'employés,
d'artisans ou d'ouvriers pouvant être relocalisés relativement facilement. Par
comparaison, on ne peut par relocaliser en quelques semaines seulement, voire
en quelques mois ou années, un champ cultivé s'étendant sur des milliers
d'hectares. Les agriculteurs comme tels peuvent être relocalisés (et nombreux
sont les Pieds-Noirs qui ont dû refaire leur vie en Corse, par exemple), mais
leur outil de production est par définition non transportable. C'est ce qui
explique que les populations rurales sont habituellement moins volatiles et
plus stables que les populations urbaines.
Le même phénomène s'observe lors de l'implantation
de la France en terre américaine. La Nouvelle France était le prolongement
nord-américain du royaume français, sa population se trouvant sous
administration civile et sous protection militaire, tout comme c’était le cas dans
la France européenne de l’époque. Pour le dire autrement, le royaume français était
bicontinental, avec une partie située en Europe, plus ancienne, et une partie
située en Amérique du Nord, bien moins peuplée mais beaucoup plus vaste.
Trois colonies de peuplement ont été implantées
graduellement, d'abord l'Acadie, puis le Canada et, enfin, la Louisiane,
reliées entre elles par des territoires placés sous protectorats, négociés
entre les peuples amérindiens et les explorateurs français. Au moment de la
Conquête, vers 1759, des embryons de colonies de peuplement commençaient aussi
à se développer en d'autres points, comme au pays des Illinois ou autour du
secteur du Détroit séparant le lac des Hurons (Huron Lake) et le lac des
Ériés (Erie Lake), dans la zone des Grands lacs, véritable château d'eau
du continent nord-américain et carrefour d'un grand nombre de voies de
communication pouvant être empruntés par des embarcations de toutes sortes.
Incidemment, il est bon de savoir que le lac des
Hurons et le lac des Michigans sont exactement au même niveau et ne forment
donc, en réalité, qu’un seul plan d'eau, malgré sa double dénomination. Pour sa
part, le lac Supérieur, nommé ainsi non parce qu'il est le plus grand, le plus
nordique ou le plus profond des Grands lacs, mais simplement parce qu'il est le
plus élevé en altitude, domine de haut tout le bassin hydrographique du fleuve
Saint-Laurent.
Le système des protectorats s'est aussi prolongé
lors de la colonisation européenne en Afrique subsaharienne, mais d'une façon
transitoire. Dans le cas du Bénin, par exemple, les premiers établissements
français résultaient d'entente avec le royaume des Popos (secteur de
Grand-Popo, à distinguer du secteur de Petit-Popo, ancien nom de la ville
d'Anecho, au Togo allemand, puis au Togo français, puis au Togo indépendant) et
avec le royaume de Porto-Novi, la capitale actuelle du Bénin. Les Français
disposaient aussi d'un fort à Ouidah, principal port de traite du royaume du
Dahomée, et d'un comptoir implanté là où se trouve actuellement la métropole
économique de Cotonou. À ces établissements, est venu ultérieurement s'ajouter
le territoire relativement vaste du royaume du Dahomée, à la suite de deux
difficiles guerres coloniales.
Par la suite, l'implantation française a
essentiellement pris la forme d'une série de traités de protectorats, négociés
à la pièce avec tous les royaumes africains, petits et grands, se trouvant
alors entre le sud du Bénin et le fleuve Niger, par le biais d'expéditions
partant de la base fluviale de Carnotville, sur le fleuve Ouémé. À l'époque,
chaque tribu, aussi minuscule soit-elle, constituait un royaume comme tel, avec
une famille royale, une cour, une armée, une langue, une culture, un ensemble
complet de traditions de toutes sortes, que ce soit au niveau de la façon de manger,
de s'abriter, de se vêtir, etc. Éventuellement, tous ces protectorats ont été
fondus et transformés par la création d'entités relativement vastes, sous le
nom de colonies, divisées elles-mêmes en cercles et regroupées entre elles
(dans le cas spécifique du Bénin) sous le nom d'Afrique occidentale française.
Il y avait aussi une Afrique équatoriale française et deux territoires sous
mandat, correspondant aux anciennes colonies allemandes du Togo et du Cameroun,
réparties entre la France et le Royaume-Uni.
Comme quoi rien n'est jamais simple...
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https://thediplomat.com/2023/08/did-china-colonize-vietnam/
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PLUS: @charles.millar3 (Twitter)
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