L'AMÉRIQUE D'HIER, L'AFRIQUE D'AUJOURD'HUI, L'ARCHIPEL DE DEMAIN...




L'Archipel humain est composé de continents, d'îles et d'îlots, mais aussi de langues, d'ethnies, de religions, de philosophies, de systèmes économiques, de systèmes politiques, etc. Il peut être présenté de bien des manières et s'imaginer de toutes les façons possibles et imaginables. Quel est l'avenir prévisible de cet artchipel? Bien des visions sont possibles. En voici une.

Il y a un grand contraste entre l'Amérique du Nord et l'Afrique noire, surtout aux plans économique et social. Les perceptions de la culture populaire, aussi, concernant ces régions du monde, présentent des différences très marquées. Aux yeux d'un économiste, l'Amérique du Nord est le centre nerveux de l'humanité d'aujourd'hui. Coeur du capitalisme mondial, il est composé surtout d'un pays triomphant, les États-Unis, et aussi d'un genre de laboratoire social, le Canada.

Les États-Unis, en particulier, la toute première puissance économique du globe, du moins pour encore quelques années, est au centre d'un vaste réseau d'entreprises multinationales, d'organismes économiques et d'institutions financières qui en font l'apex apparemment indépassable d'un modèle sans égal. La réalité des choses est plus nuancée.

De plus en plus menacés par une Chine émergente, les États-Unis vivent un déclin progressif depuis la guerre du Vietnam et doivent aussi composer avec l'existence de puissances aux intérêts pas toujours convergents et parfois très divergents, que ce soit en Europe (Communauté européenne, Russie) et en Asie (Japon, Inde, Indonésie, etc.). Entre autres, la rivalité entre la Chine et les États-Unis montre bien les limites d'un système capitaliste pur, face à aux possibilités et au potentiel d'une économie mixte, centrée sur une grande diversité modes d'organisation économique (compagnies privées, entreprises d'État, coopératives, mutuelles, etc.). Il faut aussi noter le rôle important joué par la Chine dans l'émergence d'une économie africaine plus forte, axée sur des infrastructures mieux développées (ports, chemins de fer, routes, aéroports, parcs industriels, pont, etc.).

De par sa phisolophie d'intervention, il est clair que la Chine n'entend pas profiter de l'Afrique en recourant à une vision à courte vue ou l'adoption d'une politique d'exploitation maximale visant simplement à pomper les ressources du continent noir à son propre bénéfice, mais qu'elle envisage plutôt de coopérer avec la population de ce continent en vue de l'aider à se prendre en main et à se développer d'une façon auto-centrée.

Aux yeux d'un sociologue, le portrait des différences entre l'Amérique du Nord et l'Afrique noire est également très contrasté. L'Amérique du Nord est ravagée par des maux sociaux qui sont inexistants (ou bien moins prononcés) en Afrique noire. Que ce soit au niveau des taux de criminalité, des taux de consommation de drogues ou des taux de suicide, le contraste entre ces deux régions est très fort, au moins aussi prononcé qu'entre le jour et la nuit. La qualité du tissu social n'est pas la même non plus.

Sur la scène locale, il peut se voir, pour qui sait décortiquer ce qu'il perçoit visuellement, dans le fort contraste existant entre le milieu urbain de Gatineau/Ottawa et le milieu rural de l'Outaouais québécois et de l'Est ontarien. Il y a un monde de différence, au plan social, entre Ottawa, par exemple, cette ville qui vient de franchir le cap du million d'habitants et dont certains quartiers font de plus en plus penser à un film sur l'avenir dystopique de l'Amérique, et une agglomération comme Maniwaki, la ville-sainte de mon enfance, une communauté plus pauvre, il est vrai, mais aussi bien plus saine, où il est encore possible de vivre une vie normale.

De la même manière, les différences sociales entre l'Amérique du Nord et l'Afrique noire peuvent aussi être illustrées par une comparaison sommaire des moeurs et des pratiques acceptées et tolérées ici et là. L'Amérique du Nord a été l'épicentre d'une révolution sexuelle, dans les années 60, présentée à cette époque comme une importante avancée sociale, mais de plus en plus perçue, ailleurs dans le monde mais même ici, comme le point de départ d'une dégénérescence assez prononcée des moeurs, un phénomène difficilement réversible et ne pouvant sans doute se résorber qu'au terme de plusieurs générations, suite à une prise de conscience qui ne paraît pas imminente.

Les Africains ne sont certainement pas parfaits ou exemplaires en toutes choses, mais ils n'ont pas inventé des pratiques comme le mariage ouvert, l'échangisme entre couples, les clubs de danseurs nus ou autres créations d'une culture nord-américaine de moins en moins enviable ou admirable, une culture où se reflète de plus en plus un phénomène de décomposition par le biais combiné d'une fragmentation de la société d'ensemble et d'une atomisation grandissante entre des individus-rois.

Une des plus récentes innovations de cette culture nord-américaine, notamment, c'est le polyamour, soit la redéfinition de la notion de couple pour en faire un couple-groupe formé de plusieurs partenaires, soit trois, quatre ou cinq (voire même plus), avec ou sans enfants. En d'autre termes, il s'agit d'une manière de codifier, normaliser et banaliser au plan social la sexualité de groupe. Cela fait un peu penser au retour de la bonne vieille orgie à la romaine, mais sous la forme d'une pratique un peu plus sérieuse, non ponctuelle et à long terme, sous le couvert d'une dénomination sonnant chic et faisant moderne.

Tout cela, bien entendu, a des conséquences au plan démographique. Habituellement, dans ce domaine, c'est bien connu, plus une population est riche, moins elle a un taux de natalité élevé et vice-versa, d'une façon évidemment très générale. Ce principe de base se vérifie si l'on compare les taux de natalité des Canadiens d'expression anglaise, des Canadiens d'expression française et des Américains blancs, par rapport aux taux observables en Afrique noire. Chez les populations blanches d'Amérique du Nord, ces taux sont faibles, trop faibles pour assurer le renouvellement des effectifs à court, moyen et long terme. Il en résulte la mise en place, au Canada, de deux grands mécanismes de 'melting pot', un dans le monde anglophone et un dans le monde francophone, afin de rehausser le nombre des immigrants et de favoriser leur intégration progressive dans leur milieu d'accueil.

Aux États-Unis, la situation démographique est plus complexe. Le 'melting pot' existant depuis le XIXe siècle fonctionne encore, mais avec des ratés grandissants. Les populations hispaniques, par exemple, explosent en nombre et s'assimilent peu à la majorité anglophone, entre autres à cause de la proximité de leurs pays d'origine (Mexique, Cuba, Porto-Rico, contrées d'Amérique centrale, etc.), mais aussi de la multiplication des outils culturels, éducatifs et économiques, qu'entraîne inévitablement leur remarquable vigueur démographique. Les populations d'origine asiatique augmentent aussi en nombre, mais, dans leur cas, il faut préciser que leur base démographique est bien plus étroite que celle des Hispanophones, lesquels se comptent aujourd'hui en dizaines de millions. La communauté Afro-Américaine est assez stable et ses effectifs ont tendance à se maintenir à peu près au même niveau, malgré l'ajout d'intrants en provenance des Antilles et de l'Afrique noire, relativement peu nombreux. Incidemment, l'ex-président américain Barrack Obama est d'ailleurs lui-même en partie issu d'une telle migration, lui qui est essentiellement un mulâtre, fils d'une mère américaine, chrétienne et blanche, et d'un père africain (Kényan), musulman et noir.

Le tissu social de l'Afrique noire est très différent de celui de l'Amérique du nord. Il est d'abord bien plus diversifié, que ce soit aux plans linguistique, ethnique, culturel ou, même, génétique. C'est d'ailleurs l'endroit qui, au monde, fait preuve de la plus grande diversité génétique possible et imaginable. Le concept même de société, dans le contexte africain, doit être explicité pour qu'il soit bien compris. En gros, l'Afrique noire ne constitue pas en elle-même une société. Il n'y a pas non plus de société qui corresponde à l'ensemble d'un pays africain, tout simplement parce que le concept d'État-Nation ne s'applique pas vraiment à l'Afrique noire.

La grande majorité des pays africains (il y a des exceptions ici et là, comme le Rwanda et le Burundi, entre autres) sont en fait des sortes d'empires multiethniques, un peu à l'image de l'Union soviétique d'autrefois, mais sur une surface géographique bien plus réduite. D'une certaine manière, presque chaque pays d'Afrique noire, même une contrée toute petite, est aussi vaste qu'un empire, à sa façon.

Un pays de très petite taille, comme le Bénin, avec une population approchant la douzaine de millions d'habitants, regroupe de 40 à 44 micro-sociétés bien distinctes et bien différenciées entre elles, correspondant aux multiples peuples qui forment la population nationale, c'est-à-dire les tribus/micro-sociétés qui parsement le territoire et qui, avant la colonisation européennes, constituaient autant de royaumes en butte les uns contre les autres. Un pays de taille moyenne comme le Cameroun, avec une population assez semblable à celle du Canada, compte de 100 à 120 micro-sociétés. Enfin, un pays de grande taille, comme la République démocratique du Congo, par exemple, avec une population énorme de plus de 105 millions d'habitants, a un nombre de tribus (micro-sociétés) tellement élevé que certains habitants n'osent même pas en donner un estimé.

Ces tribus (ou encore micro-peuples) sont très vigoureuses et s'enracinent profondément dans un territoire très bien défini, remontant parfois à des siècles. Pour donner un exemple concret, il existe, englobé dans le territoire municipalisé de Cotonou, la grande métropole économique du Bénin (pour avoir une idée de la relation entre cette ville et ce pays, pensez au poids de Montréal dans le contexte québécois), il existe, donc, une péninsule qui s'avance dans l'Atlantique et constitue le foyer d'une toute petite tribu de pêcheurs vivant là depuis des millénaires.

Les habitants de cette tribu parlent leur propre langue, ont leurs propres coutumes et traditions et ont leur propre mémoire collective. Ils formaient autrefois un micro-royaume, avec tous les attributs afférents à une telle entité politique, soit un roi, une famille royale, une cour et une très minuscule armée. Les résidents vivant dans les quartiers voisins, à Cotonou (une ville où, pourtant, toutes les nations du Bénin se côtoient sans trop d'anicroches), évitent soigneusement de mettre les pieds sur le territoire tribal de ce micro-peuple, tout simplement parce qu'en Afrique, il est mal vu de fouler un sol appartenant à un groupe ethnique qui n'est pas le sien, à moins d'y être invité ou d'avoir une bonne raison d'y aller. C'est une question de respect des formes et des formalités. Pour bien comprendre la mentalité africaine à cet égard, il suffit de songer à quel point il serait malaisant pour quiconque de pénétrer dans la maison de son voisin et de s'y promener à son insu. C'est exactement le même principe.

Il est fréquent, dans la culture populaire, de concevoir l'Afrique noire comme une zone surpeuplée, croulant sous le poids d'une pauvreté sans nom, trébuchant de famines en révolutions, au milieu de guerres civiles et d'une misère généralisée, accablée par un sous-développement chronique. C'est ne rien comprendre à ce continent merveilleux, extraordinaire, incontournable pour qui veut bien comprendre la nature profonde de l'histoire humaine, à la fois dans son passé, son présent et son avenir prévisible. La réalité est bien différente.

En réalité, l'Afrique est si vaste, si grande en taille, que se promener sur les routes nationales du Bénin, dans le sud de ce pays, là où se concentre pourtant le plus gros de la population fortement agricole qui y vit, c'est voir à pertes de vue de grandes étendues de forêt, presque vierge, à peine entrecoupées ici et là de champs cultivés, de villages et de petites villes. Le minuscule Bénin, voisin de l'énorme Nigéria (souvent surnommée la Chine africaine) à l'est, du Niger gigantesque au nord-est, du vaste Burkina Faso au nord-ouest et du Togo (un peu plus petit en superficie) à l'ouest, a une densité de population très élevé et cela peut laisser croire qu'il est noir de monde (sans jeu de mot facile), mais il n'en est rien. Tout est relatif, ici comme en toutes choses, et la terre béninoise est suffisamment vaste, fertile et nourricière pour accueillir une population bien plus grande que celle qui y vit présentement. C'est la même chose partout en Afrique, même au Sahel, souvent considéré en Occident comme une zone sèche et peu accueillante.

L'Afrique noire compte présentement une population d'environ un milliard d'individus, chiffre qui devrait passer à quatre milliards d'ici la fin du siècle. Concrètement, cela signifie que les Africaines et les Africains considèrent leurs perspectives d'avenir suffisamment favorables, que ce soient aux plans économique ou politique, pour justifier le rehaussement à long terme de la population, appelée à être éventuellement multipliée par quatre. Effectivement, le potentiel économique de l'Afrique est énorme. Même si le climat est pestilentiel et même dangereux pour qui n'y a pas vu le jour, la terre est très fertile et le sous-sol est incroyablement et scandaleusement riche.

Une fois dotée, avec l'aide de la Chine (et de l'Europe) d'un appareil plus complet en termes d'infrastructures de base, l'Afrique noire aura la capacité de devenir éventuellement un pôle de croissance économique pouvant éclipser tout ce que l'on a vu jusqu'ici (et que l'on verra au cours des prochaines décennies) en Chine, en Inde, au Japon ou ailleurs. Quatre milliards d'habitants, à terme, cela signifie tout simplement -et ce n'est pas rien- que l'Afrique noire abritera alors près de la moitié de la population humaine. Elle deviendra donc, tout à la fois, la toute nouvelle Asie (le continent le plus peuplé d'aujourd'hui) et la toute nouvelle Amérique du Nord (le continent le plus riche d'aujourd'hui).

L'avenir de l'espèce est en Afrique noire, tout comme l'était son passé, ancré dans la nuit des temps. Curieusement, cela permettra à l'humanité de faire un genre de retour aux sources et de se recentrer sur ce qu'elle a de mieux, les peuples originels du continent africain, le lieu même où l'espèce a vu le jour il y a un certain nombre de millions d'années. L'humanité, ainsi, en quelque sorte, entreprendra un grand ménage dans son dispositif planétaire, avant de se tourner vers sa prochaine tâche, accélérer et multiplier les gestes menant à la colonisation progressive de l'outre-espace, en commençant par le système solaire, à travers l'océan éthéré entourant Terra, la planète des origines.

Schématiquement, la géographie de la planète, sur le plan de l'histoire humaine, est très simple. Faisons, non pas la géopolitique du monde, mais la géohistoire du globe. Selon cette discipline à naître, il y a d'abord le continent des origines, situé bien au centre, là où nous sommes nés en tant qu'espèce, là où celle-ci s'est lentement, très lentement, constituée au fil des millénaires, c'est-à-dire l'Afrique, plus précisément ses régions sises à l'est et au sud, le long du fameux Rift. Ce continent peut donc être considéré comme le Nombril-Originel, le Continent-Mère, l'Ancien-Monde, le Foyer central, etc. Tout autour de l'Afrique, disposés comme les éléments constitutifs d'une couronne royale, se trouvent présentement (il faut évidemment tenir compte de la tectonique des plaques), se trouvent présentement, donc, une série de continents, au peuplement plus récent, remontant à peine à peut-être 40 000 ou 50 000 ans, guère plus.

Ces continents, d'ouest en est, se dénomment Amérique du Sud, Amérique du Nord, Europe, Asie et Australie. Ces continents, périphériques et donc assez secondaires, que sont venues peu à peu habiter des peuples divergents, issus des Tout-Premiers-Peuples, ceux vivant en Afrique depuis l'aube des temps, peuvent être considérés comme Les-Territoires-Nouvellement-Découverts, les Continents-Enfants, les Foyers-des-Alentours, les Continents-du-Voisinage, le Nouveau-Monde, etc.. L'Antarctique, selon la même logique, pourrait être rebaptisé du nom de Pôle-du-Sud.

De même, il conviendrait un jour de rebaptiser les océans, en fonction de cette nouvelle conception géographique, plus en phase avec ce que nous savons maintenant de l'histoire passée, présente et future du monde. L'océan Indien est donc en réalité l'océan Oriental, alors que l'Atlantique est bien sûr l'océan Occidental. L'océan Pacifique est tout bêtement l'océan des Antipodes. Les océans Arctique et Antarctique pourraient conserver leurs appellations actuelles mais pourraient aussi (pourquoi pas?) être appelés l'océan du Pôle-du-Nord et l'océan du Pôle-du-Sud.

Maintenant, pour ce qui est de l'Outre-Espace, soit l'Espace-Extérieur, le territoire sidéral commençant outre (i.e. au-delà) des limites de l'atmosphère terrestre, la Lune et Mars (sans oublier les deux satellites de cette planète) sont les astres qui seront très certainement colonisés en premier par l'espèce. Ces astres ne devraient pas être rebaptisés et pourraient toutefois être appelés (poétiquement ou administrativement, c'est selon) les Astres-de-la-Première-Frontière.

Pour ce qui est de Vénus, cette planète sera probablement très difficile à coloniser, voire carrément impossible, à cause de ses caractéristiques physiques propres, notamment la composition très toxique de son atmosphère, empêchant l'établissement d'autres choses que de stations automatisées ou de bases de recherche de très petite taille ou de bases en position orbitale. Dans le cas de Mercure, par contre, les perspectives d'implantation sont en comparaison bien plus favorables. Les deux corps célestes devraient donc être considérés comme le secteur des Astres-de-la-Frontière-Intérieure, soit les astres se trouvant entre Terra et Sol.

Par analogie, les Astres-de-la-Frontière-Extérieure seraient constitués de ceux (planètes, astéroïdes, satellites, etc.) qui s'étendent de l'orbite martienne aux lointains confins baignant dans l'éclat et la lumière de Sol, l'étoile actuelle de l'humanité naissante, celle qui commence tout doucement à surgir de son berceau terrestre pour entreprendre la plus grande des colonisations, la plus belle des aventures.

 L'auteur de ces lignes n'assistera sans doute qu'aux balbutiements de cette grande aventure, celle-ci ne faisant que commencer à s'élancer timidement, mais ses enfants et ses futurs petits-enfants y participeront certainement, à leur façon, ne serait-ce que comme citoyens contribuant au budget du super-pays qui, un jour, espérons-le, couvrira l'ensemble de la surface de la Terre-des-Hommes, la Terra des Humains, la planète qui constitue présentement notre Tout-Premier-Astre.

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