LE RÊVE INDÉPENDANTISTE, ENTRE DEUX MARÉES

Soixante-et-un ans après le début de la Révolution tranquille, ce vaste effort de modernisation de la société québécoise, le rêve indépendantiste, apparemment disparu pour toujours, entièrement sous le radar du monde anglophone (et sa redoutable machine à propagande), renaît peu à peu.

Ce rêve est partagé par une constellation éclatée, autrefois réunie sous l'aile d'une seule formation politique, le Parti québécois, créé par René Lévesque en 1968, aujourd'hui éparpillée à droite et à gauche (littéralement). Cette constellation regroupe 1) un PQ diminué, pas réellement revivifié par un nouveau chef (malgré les mérites de celui-ci), incertain quant à son avenir, 2) le Bloc québécois (actif sur la scène fédérale), 3) une députée indépendante, 4) des dizaines et des centaines de milliers de sympathisants et militants désabusés, passés à la Coalition avenir Québec (centre-droite, au pouvoir), 5) un nombre équivalent qui ont tout simplement choisi de se désengager de la vie politique, plus 6) tous ceux qui se sont tournés vers Québec solidaire (gauche, nominalement indépendantiste, mais d'abord tourné vers l'environnementalisme, le féminisme, le socialisme et la justice sociale), ainsi qu'un certain nombre de 7)  groupes et sous-groupes très actifs (mais heureusement peu nombreux) qui ont glissé vers l'extrême-droite, attirés par des discours identitaires, xénophobes, anti-immigrants, anti-noirs, anti-musulmans, etc.

Cette constellation est à la recherche d'une recristallisation mais tout est encore très flou, présentement. La députée indépendante mentionnée ci-haut a d'ailleurs quitté la bannière du PQ peu après les élections de 2018 pour réfléchir à des moyens de recentrer le mouvement indépendantiste sur de nouvelles bases. Cette élue, Catherine Fournier, est la plus jeune députée de l'Assemblée nationale et elle semble présentement avoir décidé de se rediriger vers d'autres champs politiques, tel que le municipal.

Toujours est-il que le mouvement, loin d'être mort, se trouve dans un état de redéfinition et ballote actuellement sur des eaux relativement calmes, avant la tempête qu'annoncent peut-être les prochaines élections, celles de l'automne 2022, alors que la CAQ devra affronter le verdict des électeurs et électrices. La chaloupe "séparatiste" continue donc de se balancer sur une mer apparemment assez tranquille, mais fluide et mouvante, entre deux marées...