MOI, KHALIL GIBRAN

 

Je suis un poète.

Je l'avoue et l'admet.

J'ai l'âme trop sensible et très rêveuse du poète typique.

J'ai l'esprit étrange, quasi-incompréhensible, du vrai poète, cette créature mi-humaine, mi-mythique.

Je suis un poète de chair et de sang, de pleurs et de rires, de vie et de mort.

Je suis poète et, donc, peut-être, quelque chose comme la conscience de l'humanité.

Je suis Émile Nelligan, Khalil Gibran, Tagore et bien d'autres de mes semblables, au cours de la longue histoire de cette folle et parfois merveilleuse espèce qu'est l'humanité...

Nous sommes tous poètes et, tous, nous sommes un peu fous, parfois même carrément cinglés, du moins aux yeux des "normaux".

Il est vrai qu'il faut être un peu cinglé pour percevoir ce que nous percevons.

Il m'arrive, en regardant quelqu'un, de deviner ce qu'il pense, de pressentir ce qu'il va dire, de savoir ce qu'il craint ou ce qu'il espère, de pouvoir dessiner l'aura du système nerveux de certains êtres.

Mon esprit ne fonctionne peut-être pas exactement comme les autres, il m'a fallu longtemps pour commencer à m'en douter, n'ayant point de façon de me comparer aux autres. Qui sait, en effet, ce qui peut bien se passer, exactement, dans la tête d'une autre personne?

Je n'y peut rien, tout simplement rien, rien de rien  rien du tout.

À ce stade de ma vie, je me contente de tout enregistrer, de tout décrypter et de tenter de mettre un sens dans ce fatras, cette masse d'informations sans queue ni tête, ce chaos immense et informe.

Parce que je ne suis, au fond, guère plus qu'un pauvre con de poète.

CM