LA SANTÉ MENTALE DE L'ESPÈCE ET LA CHINE...



Comme mentionné dans un billet précédent (''L'AMÉRIQUE DU NORD MINÉE PAR LES MAUX SOCIAUX'', publié le 1er août dernier), l'Amérique du Nord, plus particulièrement sa moitié sud, correspondant à la République américaine, souffre de maux sociaux sans nombre, combinés à une richesse matérielle et financière indéniable, ainsi qu'à une culture et une langue incroyablement dominante et envahissante.

Les États-Unis sont un colosse aux pieds d'argile, un pays sans épaisseur historique, contrairement au Royaume-Uni ou à la France, chacun vieux de mille ans et plus. C'est aussi un pays qui a connu une trajectoire essentiellement ascendante dès sa naissance et, en fait, dès sa conception, en tant que plusieurs colonies britanniques éparpillées sur la portion orientale du continent.

De Jamestown et Plymouth, ce pays n'a connu aucun problème majeur jusqu'à la Deuxième guerre mondiale, si ce n'est la guerre de Sécession qui, avec 600 000 morts et des destructions sans nombre, a été un véritable cauchemar, mais un cauchemar relevé avec brio, à l'arraché. Entendre Donald Trump (''Trump the Don'') se comparer favorablement à Abraham Lincoln (''Honest Abe''), c'est entendre une chipie ou une Imelda Marcos se proclamer plus admirable qu'une Cendrillon. Lincoln, cet homme trop haut, trop maigre, trop laid (avez-vous déjà examiné attentivement ses photos?), trop malchanceux avec ses généraux, avait un sens politique autrement plus fin que celui d'un multimilliardaire élevé à l'âge des plaisirs faciles, de l'argent facile et du sexe facile, gâté par une culture profondément malade de son succès planétaire, boursouflé d'orgueil et de sa propre importance, envouté par les thèmes habituels de l'extrême-droite la plus bête, la plus patriotique, la plus vile, la plus musclée et la plus démagogique qui soit. Bref, c'est un semi-fasciste (pour rester poli) qui fait irrésistiblement penser au sinistre bouffon qu'était Benito Mussolini à l'époque de mes parents. La plus grande différence entre les deux, sans doute, c'est qu'il ne finira probablement pas comme lui, pendu par les pieds par son propre peuple, mais sera possiblement déifié et adulé jusqu'au bout par une populace inculte et incapable de voir au-delà des faux-fuyants et de l'apparence clinquante des veaux d'or d'aujourd'hui.

Après la Deuxième guerre mondiale, par contre, il y a eu 1) la guerre du Vietnam (ou deuxième guerre d'Indochine, selon les points de vue), avec une défaite militaire traumatisante, 2) la révolution sexuelle, la pire catastrophe sociale à avoir jamais frapper le monde occidental, avec des séquelles qui persistent encore aujourd'hui, 3) la crise politique du Watergate, amenant une cassure fondamentale entre le peuple américain et ses gouvernants, 4) l'invasion unilatérale de l'Irak en 2003, suite à une série de mensonges honteux, longs comme le bras et tout azimuts, aussi bien aux contribuables et électeurs américains qu'aux alliés de l'Amérique ou à l'ONU (une instance qui prend de plus en plus le rôle de la conscience du monde), 5) la guerre contre le communisme, gagnée contre l'Union soviétique (premier round), mais perdue d'avance contre la Chine (deuxième round).

Il faut admirer la façon dont le gouvernement chinois a joué ses cartes entre la chute du communisme russe et la situation actuelle. Disons-le: quels incroyables joueurs de Go sont-ils, ces Chinois! Les Russes excellent aux échecs, un exercice où l'objectif est de tuer le roi ennemi, alors que les Chinois, issus d'une civilisation plurimillénaires, préfèrent le Go, un jeu lent et long, dans lequel ce qui importe est de contrôler le plus de territoire possible, une pierre à la fois, le territoire étant considéré comme un espace utile, que ce soit sous la forme de districts agricoles ou de mines, de zones de pêche, de passes montagneuses, d'îles, de rivières poissonneuses, etc. Il faut donc manipuler l'espace et le temps pour étendre son empire sur le plus de ressources productives possible, ainsi que sur les populations qui se trouvent sur le terrain. Rappelons qu'au cours des millénaires, le peuple chinois, essentiellement paysan, avait l'habitude de payer ses impôts à quiconque se trouvait au pouvoir, à tel ou tel moment, quel que soit le district particulier où le contribuable résidait, le pouvoir en place pouvant prendre la forme d'une dynastie domestique ou d'une dynastie étrangère, d'un empire tout-puissant, de plusieurs royaumes ennemis entre eux, de principautés rebelles, etc.

La France a dominé le monde au XVIIIe siècle, suivie du Royaume-Uni au XIXe siècle et de l'Amérique au XXe siècle. Celui ou celle qui n'a pas encore compris que le présent siècle, le vingt-et-unième, appartiendra inévitablement à la Chine populaire n'a rien compris de tout ce qui s'est passé au cours des vingt-et-une dernières années. Le flambeau va passer du monde occidental/européen au monde asiatique, si ce n'est déjà fait. Les Britanniques et les Français, vivant les uns comme les autres dans ce qui est trop souvent considéré comme le Vieux-Continent (un titre qui revient sans conteste à l'Afrique, berceau de l'humanité), les Russes et les Américains, deux peuples qui font partie des franges de l'Europe, les Russes à l'est, éparpillés jusqu'à la pointe de la Sibérie, et les Américains à l'ouest, éparpillés jusqu'à l'archipel hawaïen et la péninsule alaskane (nez à nez avec la Russie, curieusement, avec un intervalle d'à peine quelques kilomètres entre les deux Diomèdes), font tous partie du même monde culturel.

Ce n'est pas le cas de la Chine, une civilisation en elle-même. La Chine a des ressorts et des modes de pensée qui nous sont profondément étrangers, à nous, occidentaux. La dominance chinoise aura des conséquences et des effets qui seront considérables, à l'image de son pouvoir économique qui, bien qu'énorme actuellement, n'est que l'ombre de ce qu'il sera sans doute au cours des prochaines décennies. Les événements actuels auront des retombées difficiles à prévoir, d'autant plus que l'Inde, elle aussi en pleine ascension, prendra également beaucoup plus de place sur la scène économique et politique. Siècle de la Chine, le XXIe sera aussi, dans un sens plus large, celui de l'Asie toute entière, avec des puissances majeures, comme la Chine et l'Inde, bien sûr, mais aussi l'Indonésie, le Japon et l'Iran.

Ce changement majeur va entraîner des retombées de toutes sortes, dont un recentrage culturel qui fera beaucoup de bien, la culture américaine, omniprésente mais de plus en plus superficielle, vaine et vide, n'ayant pas la capacité de résister longtemps à la culture chinoise, bien mieux équilibrée et bien plus équilibrante.

La culture américaine, composée A) d'un mélange de matérialisme obsessif et d'individualisme débridé, B) d'un parti pris trop marqué envers les libertés individuelles, au détriment des intérêts collectifs (on voit bien ce que cela donne, en ces temps de pandémie, avec des individus mal avisés qui préfèrent leur liberté personnelle à leurs chances de survie -pourquoi les gens les plus conservateurs de nos sociétés sont-ils ceux qui sont les plus réticents à cet égard?-), C) d'une urbanisation débridée (vivre dans le plastique, l'asphalte, le béton et le métal toute sa vie n'est pas exactement propice à une bonne santé mentale), D) de conceptions malsaines (délire à la QAnon, attirance envers les armes à feu et la violence comme mode de résolution de conflit, culte de la nouveauté à tout pris, culte de l'éternelle jeunesse, culte de la suprématie de l'apparence physique, etc.), E) de la recherche constante du gadget miracle et de la technologie de pointe, révolutionnaire, comme si la dernière bébelle à la mode allait réellement changer le monde et sauver les États-Unis de leur déclin inéluctable et déjà amorcé depuis 1945, et F) de la conviction que le monde a besoin de l'Amérique et non le contraire, n'a pas nécessairement un impact positif ou utile sur la trajectoire du monde humain, par les temps qui courent.

Pour l'espèce humaine, le déclin américain et la montée en puissance de la Chine sont deux éléments qui sont encourageants et qu'il faut encourager. La presse américaine (et anglophone, en général, les quatre royaumes britanniques oeuvrant à l'unisson et vivant au diapason de leur imposant cousin américain) est puissante, vocale et très audible, mais la vérité doit se faire entendre au-dessus du tintamarre des affaires courantes et des opinions dominantes.


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Commentaires

  1. Très bien écrit excepté le "vive la révolution socialiste" La Chine qui se dit communiste n'a rien de vraiment communiste ; c'est plutôt une dictature éclairée.

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