LA MAISON DE DIEU (1)
LA MAISON DE DIEU (1)
LA NATURE DU DIVIN
L'humanité, au cours de trop nombreux millénaires pour qu'il soit possible aujourd'hui d'en connaître le décompte exact, vit entourée d'êtres hors du commun et hors du monde naturel: fées, leprechauns, cyclopes, trolls, géants souterrains, gnômes, fantômes, créatures invisibles, golems, Gog et Magog, etc. Plus récemment, sont apparues une série d'entités transcendantes, toujours non humaines et, généralement, plus qu'humaines, extra-humaines, voire carrément extra-terrestres: Dieu, dieux, déesses, créatures mythiques d'outre-espace...
Fondamentalement, l'humanité, en tant qu'espèce animale consciente, relativement éclairée mais inégalement intelligente, toujours en cours de développement au long d'une évolution graduelle s'étirant sur des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers, des milliers de milliers d'années, avec des capacités cérébrales globalement en expansion et des connaissances de plus en plus pointues et approfondies, au point d'en être parfois inquiétantes (en cas de guerre généralisée, combien de fois est-il possible d'éradiquer toute vie sur Terre avec les armes nucléaires actuelles?), a besoin de croire en des choses merveilleuses, dépassant le banal et l'usuel, et ressent aussi le besoin ne pas se sentir seule. Nous sommes une espèce sociale qui ne se définit qu'en groupe et ne peut réellement vivre qu'en société plus ou moins bien organisée.
Dans la Chine ancienne, les générations du moment se réfèraient aux générations révolues et se guidaient à l'aide de leur sagesse accumulée, notamment sous l'influence du confucianisme, une philosophie axée sur le respect des ancêtres, des traditions et de l'autorité. Dans les régions asiatiques de tradition bouddhiste, toute l'histoire humaine s'explique par la notion fondamentale du besoin et la nécessité, non pas de le combler mais de le transcender en éliminant son existence même. La pensée du Bouddha, d'abord essentiellement philosophique, s'est transmuée au cours des âges en système religieux, axé notamment sur le dénuement, avec une forte tradition monastique rappelant le catholicisme chrétien, sur la transmutation de l'esprit, d'un corps à l'autre et d'une génération à l'autre, avec la réincarnation, sur la non violence, avec le respect dû à toute vie, etc.
Dans le monde indien, l'hindouisme rassemble un large panthéon faisant penser à un fouillis hétéroclite et chaotique, avec un grand nombre d'entités basées sur le mond des humains, des singes, des éléphants, etc., et rappelant aussi, irrésistiblement, la mythologie grecque, avec son étonnante profusion de dieux et de déesses, toujours en interaction les uns avec les autres, de façon parfois assez violente, un peu à l'image des cités grecques et des Grecs eux-mêmes, entre eux, à cette époque.
Plus près de nous, la pensée monothéiste, rassemblant Juifs, Chrétiens et Musulmans dans un même dialogue divin, est née au Proche-Orient, s'est répandue sur tout le globe et a dominé les esprits pendant des millénaires. Elle continue de le faire avec vigueur, surtout hors du monde occidental, en Afrique et en Asie. Le judaïsme est la plus ancienne de toutes ces religions, celle qui en est l'origine et qui a engendré les autres, et les gens qui s'en réclament sont relativement peu nombreux, avec des concentrations en Israël, aux États-Unis et en France. Le christianisme, pour sa part, est nominalement la religion la plus répandue dans le monde, celle qui rassemble le plus de croyants, mais elle souffre de son caractère surnaturel, axé sur la nécessité de croire en des miracles, en une naissance virginale, en la possibilité de marcher sur les eaux et de ressuciter les morts et en un fils de Dieu qui meurt et ressuscite lui-même. Le développement des sciences en Europe au cours du Moyen-Äge lui a infligé des coups difficiles à surmonter.
L'Islam, enfin, demande surtout de se soumettre à la volonté divine et ne fait pas autant appel au surnaturel. Pendant que les moines et les papes faisaient la loi et régentaient tout au Moyen-Âge, en Europe, les savants musulmans, eux, dans le monde islamique, gardaient vivantes les connaissances scientifiques issues de l'antiquité et les approfondissaient. Aujourd'hui encore, l'Islam est vigoureux et continue de bien se porter et de se répandre sur tous les continents, grâce à l'immigration et un taux de fécondité élevé (Europe, Amérique du Nord), mais aussi, grâce à son prestige intrinsèque (Afrique, Asie), tandis que le christianisme s'éteint peu à peu, de son côté, un chrétien à la fois.
Le communisme, créé au XIXe siècle, dans le sillage de la Révolution industrielle, a semblé longtemps servir de nouvelle idéologie transcendante, capable d'unir les humains de toutes les conditions, de toutes les races, de tous les continents. Cette expression assez extrême du socialisme, organisée et élaborée par Karl Marx, mais née avant lui, a été détourné vers des voies inattendues et surprenantes, après la mort de ce dernier, à Londres. Les théoriciens marxistes prévoyaient un soulèvement des masses ouvrières, le prolétariat, dans l'ensemble du monde occidental, là où le capitalisme faisait le plus de ravages, alors qu'en fait, les mouvements ouvriers et les partis d'obédience social-démocrate et socialiste avaient déjà commencé à y résorbé peu à peu les pires excès.
La prise du pouvoir, par voie de coup d'État, du Parti bolchévique en Russie, avec Vladimir Lénin, dans le sillage de la défaite catastrophique des armées tsaristes lors de la Première guerre mondiale, a pris tout le monde complètement par surprise et entraîné le mouvement communiste dans des directions nouvelles et non-planifiées, un phénomène amplifié encore davantage par l'anihilation des communistes allemands par les nationalistes de ce pays (sous le règne d'Adolf Hitler et du nazisme), puis l'émergence du Parti communiste chinois, sous l'impulsion du Grand Timonier, Mao Tsé-Toung, après la Deuxième guerre mondiale. Dans l'Occident comme tel, le communisme, comme idéologie de masse, a survécu encore plusieurs décennie, notamment en France et en Italie, avec respectivement le quart et le tiers de la population de ces pays à la toute fin de la Deuxième guerre mondiale, mais d'une façon résiduelle. La fatigue, l'érosion et les limites du pouvoir soviétique en ont eu raison, tout comme la divulgation des horreurs concentrationnaires éprouvées par les zeks du Goulag.
Plus près de nous, le développement de la pensée écologique et environnementaliste, au cours des dernières décennies, est certainement l'événement le plus important des derniers cinquante ans, au plan idéologique, amenant peu à peu l'humanité à se percevoir comme le gardien de son foyer, c'est-à-dire (pour l'instant) l'ensemble de notre planète, seul endroit connu où se trouve la vie, Terra, la Maison de Dieu.
(Voir la deuxième partie...)
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