LES AFRIKANERS SE REGROUPENT AU CAP

 

Carte assez générale illustrant l'implantation de l'afrikaans,
la langue parlée par les Afrikaners de l'Afrique du Sud et de laNamibie,
soit de façon majoritaire (bleu foncé), soit de façon minoritaire (bleu pâle).
Source: Wikipedia 2023

Carte des densités de population en Afrique du Sud,
toutes ethnies confondues. À noter des concentrations importantes dans la province
du Cap-Occidental (ville du Cap et le territoire rural proche), la province
du Gauteng (grosso modo, la région urbanisée et économiquement importante
qui regroupe le bassin minier du Witwatersrand,
centré sur Johannesbourg, et l'agglomération de Prétoria),
du KwaZulu/Natal (partie sud-est du pays) et de l'aire linguistique xhosa
(au sud-ouest du KwaZulu/Natal),
Source: Wikipedia 2023

Carte remarquablement détaillée de l'occupation des sols par
les principales ethnies présentes en Afrique du Sud. On note, par exemple,
des concentrations zoulous denses au KwaZulu/Natal, ainsi que
dans le sud-est de l'ancien Transvaal. Pour les Boers (Afrikaners),
la seule concentration notable se trouve dans le sud-ouest
de l'ancienne province du Cap, l'actuelle province du Cap-Occidental,
le domaine des Cape Boers. Les Boers vivant dans ce qui était
le Transvaal et l'actuel État d'Orange (Trekboers) sont trop dispersés,
trop urbanisés ou trop peu nombreux pour apparaître
sur cette carte. Source: Wikipedia 2023

Carte de l'occupation des sols par les locuteurs afrikaners,
essentiellement ici des Cape Boers et des Coloureds
(une ethnie née de mélanges anciens entre Néerlandais, Hottentots,
Cape Malays, etc. Source: Wikipedia 2023. Cette fois-ci, toute
l'ancienne province du Cap, immense, se révèle profondément imprégnée
de la culture afrikaner, sauf pour l'agglomération de la ville du Cap,
là où prédomine l'anglais. Les Boers (fermiers, en langue afrikaner)
sont propriétaires des espaces cultivés (écoumène) de la majeure partie
de l'ancienne province du Cap, mais aussi dans une partie de
l'ancienne Orange Free State, ainsi que dans des endroits assez  isolés
représentant l'espace occupé par les descendants des Trek Boers.
Les descendants des anciens colons britanniques, eux,
sont nombreux au Cap, dans l'est de la vieille province du Cap,
dans le KwaZulu/Natal et dans la région urbaine
du Witwatersrand (Gauteng). On se souviendra qu'Elon Musk,
par exemple, est originaire de Prétoria, dans ce secteur. Source: Wikipedia 2023

Carte des concentrations de locuteurs afrikaners. On note
la présence actuelle de deux grands pôles:
le Cap-Occidental pour les Cape Boers, 
le Gauteng pour les Trek Boers. 
Source: Wikipedia 2023


D'une façon assez générale, il semble que l'on soit témoin, depuis quelques années, d'un recentrage de la population de langue afrikaner, descendants des Boers, effaçant l'héritage du Grand Trek et menant à un regroupement des Afrikaners dans l'ancienne province du Cap, soit dans la partie ouest de l'Afrique du Sud.

Pour mémoire, rappelons que les Afrikaners, autrefois connu sous le nom de Boers (les Cape Boers pour ceux vivant au Cap ou les Trek Boers pour ceux ayant participé au Grand Trek du XIXe siècle, sont issus des colons néerlandais établis au Cap depuis le XVIIe siècle (1652: arrivée des Néerlandais et fondation du Cap). Ces colons se sont progressivement mélangés à d'autres groupes ethniques (Hottentots, Cape Malays, Huguenots francophones, Allemands, etc.), créant par le fait même un tout nouveau peuple ayant une langue de plus en plus distincte du néerlandais, soit l'afrikaner.

Les Afrikaners, progressivement, se sont multipliés dans l'ancienne province du Cap, puis certains d'entre eux, à cause de l'arrivée des Britanniques, se sont élancés dans le veldt sud-africain (Grand Trek) pour leur échapper et créer de petites républiques boers, les deux plus importantes étant le Transvaal et l'État libre d'Orange. Ces Trek Boers ont ensuite été vaincus et occupés par l'Empire britannique. Lors de la création de la colonie unifiée d'Afrique du Sud, les Boers, plus nombreux que les colons britanniques, ont pris le contrôle de la nouvelle république sud-africaine, dominée essentiellement par une minorité de Blancs (afrikanerophones et anglophones), et créant du coup le système raciste de l'apartheid pour empêcher les membres des peuples noirs sud-africains, largement majoritaires sur l'ensemble du territoire, d'exercer leurs droits politiques. Après plusieurs conflits, les Boers ont finalement renoncé au système d'exclusion nommé apartheid et accepté de laisser le champ libre aux Noirs sud-africains, représentés par l'African National Congress, de Nelson Mandela.

À l'heure actuelle, en nombre les Boers sont très nombreux dans l'actuelle province du Cap-Occidental (autour de la ville du Cap, cœur historique du pays) et du Gauteng (autour de la ville de Johannesbourg, cœur économique du pays), formant deux pôles de concentration dense. Il semble que les Boers du Gauteng, de façon plus ou moins spontanée, ont entrepris de se relocaliser peu à peu dans la province du Cap-Occidental, pour plusieurs raisons.

C'est plus avantageux pour eux au plan sécuritaire, plusieurs familles agricoles afrinakers vivant de façon isolée ayant été assassinées par certains groupes noirs d'extrême-gauche, depuis quelque temps. Un cas récent a d'ailleurs fait l'objet de reportages dans les médias il y a quelques semaines. Un recentrage dans la province du Cap-Occidental permet aussi aux nouveaux arrivants afrikaners de vivre dans un milieu majoritairement afrikaner, au lieu de faire partie d'un milieu minoritaire, dominé par l'anglais mais aussi d'autres langues, comme le zoulou, comme c'est le cas au Gauteng. La relocalisation en cours, quoiqu'encore balbutiante, a aussi l'avantage de permettre aux relocalisés, plus fortunés que la moyenne des Afrikaners, d'acheter de la terre à un coût abordable. Il faut noter ici que la société afrikaner, dans son ensemble, reste encore profondément marquée par son passé rural et agricole. Il suffit de mentionner l'industrie vinicole sud-africaine, largement concentrée au Cap-Occidental, mais aussi de plus en plus largement dans l'ancienne province du Cap.

Selon certaines sources, les Afrikaners, après avoir dominé la vie politique sud-africaine pendant des décennies, disent se sentir méprisés et conspués depuis la fin de l'apartheid, et ont peu de prise sur la vie économique du pays, étant encore très portés sur l'agriculture. La minorité blanche anglophone a davantage de pouvoir économique et jouit de bien meilleures relations avec les peuples noirs qui représentent les quatre cinquièmes de la population de l'Afrique du Sud. Les relations entre Afrikaners et Zoulous, d'une manière générale, sont apparemment très mauvaises, alors que celles entre Afrikaners et Xhosa sont bien meilleures. Les Zoulous sont renommés pour leur influence grandissante dans le domaine politique. Les Xhosas, pour leur part, vivent surtout au sud-ouest du Kwa-Zulu/Natal et sont encore très nombreux au sein de l'African National Congress (M. Mandela était lui-même d'ascendance xhosa). L'impunité relative dont jouissent les membres des groupuscules d'extrême-gauche qui s'attaquent aux fermes isolées constitue une source grandissante d'inquiétude au sein de la communauté afrikaner. Selon ces mêmes sources, les Trek Boers vivant dans l'ancien État libre d'Orange (rebaptisé Free State, au lieu d'Orange Free State), particulièrement nombreux dans la partie sud-ouest, là où ils sont aussi majoritaires, assurent leur sécurité quotidienne par des contacts étroits et par le simple fait qu'ils possèdent et contrôlent les terres qu'ils cultivent.

Tout ce faisceau de données laisse entendre que le peuple afrikaner, d'une façon apparemment non concertée mais résultant simplement des conditions politiques et économiques locales, est en train d'effacer des chapitres entiers de son histoire, oubliant le Grand Trek d'autrefois et revenant en quelque sorte aux sources de son ethnogenèse, dans la province du Cap, plus précisément autour de la ville du Cap. Celle-ci est multi-ethnique, avec des représentants de tous les peuples sud-africains, incluant des communautés chinoise et indienne, relativement nombreuse. Linguistiquement, l'anglais domine dans la ville, d'une façon générale, malgré la présence d'une minorité afrikanerophone. Il n'est pas impossible que le recentrage en cours amène éventuellement la création d'une majorité afrikanerophone dans cette agglomération importante.


* * *

Sources: données démographiques et linguistiques disponibles sur Wikipedia, différents articles récents de la presse, notamment un article de la revue The Economist sur une migration croissante d'Afrikaners fortunés vers le Cap et une conversation très instructive et approfondie avec une jeune Afrikaner de passage au Canada et rencontrée inopinément.


* * *

PLUS:  @charles.millar3 (Twitter)












Commentaires

Les articles les plus consultés

CANADA: FROM KINGDOM TO REPUBLIC

LE DÉSÉQUILIBRE CANADIEN

LES OLYMPIADES VAGABONDES...