UN MONOPOLE QUI N'EN FINIT PLUS

 


Depuis le milieu du XXe siècle, l'Outaouais québécois vit dans l'ombre d'un monopole politique presqu'ininterrompu.

Le Parti libéral du Québec a dominé le paysage politique outaouais pendant des dizaines d'années, pour plusieurs raisons. Comme une bonne partie de la province de Québec, l'Outaouais a d'abord vibré au rythme de l'Union nationale (centre-droite) à l'époque de Maurice Duplessis. Ensuite, au tournant des années '60, la région s'est mise à l'heure du Parti libéral. C'était l'époque de la Révolution tranquille. Peu après, le Québec a commencé une nouvelle époque, avec la naissance du Parti québécois et la diffusion des idéaux indépendantistes. Le Québec s'est alors rassemblé en deux camps, les Libéraux (fédéralistes) et les Péquistes (indépendantistes). Dans l'Outaouais, cela s'est traduit par une nette domination du PLQ, surtout pour des raisons économiques. La présence de dizaines de milliers d'employés de fonctionnaires fédéraux et d'employés du secteur privé travaillant à Ottawa a fait en sorte que le PLQ a pris un ascendant très fort, en Outaouais. La région craignait des pertes d'emplois majeures en cas de victoire souverainiste.

Dans le cas de la circonscription provinciale de Hull, pour donner un exemple concret, un député unioniste (Alexandre Taché) a siégé comme député de 1944 à 1955. Il a été succédé par des libéraux pendant toute la période suivante, à la seule exception du mandat de la péquiste Jocelyne Ouellette, de 1976 à 1981. La même chose s'est produite dans la circonscription de Gatineau, avec un député unioniste de 1948 à 1962, puis des députés libéraux jusqu'aux dernières élections.

Ce monopole politique était d'autant plus fort qu'il s'exprimait à plusieurs niveaux. Les politiciens libéraux se conjuguaient aux gens d'affaires libéraux et aux médias libéraux pour créer une convergence d'opinions assez impressionnante. Rares étaient les voix discordantes dans ce choeur. Tout ce beau monde dansait gaiement en rond en se tenant par la main et en chantant les mêmes chansons, dans un mouvement qui semblait destiné à perdurer encore longtemps.

C'est probablement le deuxième référendum, celui de 1995, qui a été un tournant marquant. La disparition du spectre souverainiste, conjuguée à l'arrivée de milliers d'émigrants venus d'ailleurs dans la province, ainsi que du reste du monde, ont commencé lentement à modifier la configuration des rapports de force dans la région outaouaise et à lézarder la domination libérale. Plusieurs maires de villes rurales, n'appartenant pas au PLQ, sont apparus peu à peu, ici et là, parfois avant même le référendum. L'élection d'un maire d'obédience péquiste, bardé d'un parti politique municipal, a aussi changé la donne à Gatineau. La manifestation la plus flagrante d'un changement de garde en cours a certainement été la victoire de trois députés de la Coalition avenir Québec (centre-droit) en 2018, dans les circonscriptions de Papineau, Chapleau et Gatineau. Pour la première fois depuis une cinquantaine d'années, la majorité des sièges de l'Outaouais échappait au PLQ.

L'histoire n'est pas seulement quelque chose qui se lit, mais aussi quelque chose qui s'écrit et se déroule sous nos yeux. Nous verrons au cours des prochaines années ce qu'il adviendra du monopole libéral qu'a connu l'Outaouais pendant si longtemps...


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