POURQUOI LES IMMIGRANTS SONT SI ANTI-QUÉBÉCOIS
Il y a, entre les Canadiens anglais et les Canadiens français, tout un
bagage d'incompréhension et de défiance, entretenu pendant deux siècles et demi
de méfiance réciproque, de rebellions écrasées dans le sang, d'aspirations
déçues, d'insultes et de gestes déplacés. Depuis la Conquête de 1759,
francophones et anglophones du Canada se regardent comme chiens de faïence,
enfermés dans les fameuses ''deux solitudes'' qui caractérisent le climat
social du nord de ce continent riche mais de plus en plus dégénéré. De crainte
de partir une chicane, les deux parties se regardent sans oser se parler, font
mine de s'apprécier, mais en agissant comme deux scorpions enfermés dans la
même bouteille, à la différence que l'un ne peut tuer l'autre et vice versa.
Les relations entre les deux principales
communautés culturelles du Canada semblent déteindre sur les immigrants qui,
venus de partout dans le monde, de tous les continents et de toutes les îles,
reprennent par la force des choses les réflexes qu'ils trouvent ici à leur
arrivée. Ils s'approprient les tendances et les habitudes de pensée qui
existent dans ce pays et, parfois, les amplifient. Cela se voit à plusieurs
signes.
Il suffit de penser à Amir Attaran, cet
universitaire américain d'origine iranienne qui vit en Ontario et qui se
délecte à faire des remarques et des commentaires désobligeants et, souvent,
carrément diffamatoires sur Twitter, à l'endroit des Québécois francophones,
présentés systématiquement comme des retardés mentaux, des racistes, des
individus louches et imbéciles, en se basant sur des incidents isolés et non
reliés, par exemple le décès tragique d'une mère autochtone (attikamew) dans un
hôpital de Joliette, au nord de Montréal. À l'en croire, le Québec est un genre
d'Alabama North, refuge de crétins arriérés, anti-noirs et anti-autochtones.
Le ''Quebec-bashing'' est devenu le
nouveau sport national des Canadiens anglais depuis quelques années. L'échec
des deux référendums de 1980 et de 1995 y sont pour quelque chose, les
anglophones considérant maintenant que le Québec est acquis, n'est plus un
problème et peut être tourné en ridicule sans trop s'inquiéter. Nous ne leur
faisons plus peur. L'hydre du nationalisme québécois semble mort à jamais
et pour toujours, ce qui est loin d'être exact, mais il est vrai qu'il faut
bien connaître le Québec pour s'en rendre compte et en être conscient.
Ce monsieur Attaran est loin d'être le seul
immigrant canadien à dire à voix haute (ou à Twitter déployé) ce que bien des
Canadiens anglais pensent tout bas mais n'osent exprimer publiquement, par
politesse ou par crainte de se voir traiter de racistes ou d'anti-francophones.
Beaucoup d'autres immigrants le font aussi, pour se faire bien voir de leurs
compatriotes anglophones ou par esprit d'imitation et de troupeau.
Il y a plusieurs raisons qui peuvent expliquer
cette attitude à prime abord surprenante. En effet, pourquoi des groupes
minoritaires, venant d'arriver, se défient-ils automatiquement de groupes
minoritaires déjà en place, alors que l'on pourrait s'attendre à ce qu'ils se
trouvent des intérêts communs? D'abord et avant tout, il faut souligner le
facteur de l'ignorance et de la méconnaissance. Le Canada, hors de nos
frontières, est perçu d'abord et avant tout comme un pays anglophone ou
majoritairement anglophone. C'est un peu comme la Nouvelle-Zélande, dont le
caractère anglophone est le premier qui est apparent aux yeux des étrangers,
malgré le fait que les premiers occupants du territoire, les Maoris, sont
encore 15 % de la population de ce pays, conquis de haute lutte par la marine
et l'armée britannique, au cours d'une série de longues guerres cruelles et
impitoyables. Si l'on ajoute les nouveaux arrivants des archipels environnants
(Tongans, Fidgiens, etc.), on se rend compte que les gens d'origine
polynésienne avoisine tout de même le tiers de la population totale.
Un autre facteur, c'est que ce que savent les
gens de l'extérieur du Canada, ils le savent habituellement par l'intermédiaire
des moyens d'information de l'univers culturel anglophone (livres, magazines,
films, vidéos, séries télévisées, etc.), dans lesquels la portion
canadienne-française de la population est souvent présentée de façon
folklorique et, parfois, carrément fausse. Pire encore, les réalités
historiques sont parfois même distordues et trafiquées pour faire bien paraître
les acteurs incarnant des rôles anglophones. Pensons seulement au film à succès
The Revenant (2016), avec des acteurs francophones incarnant des personnages
louches et racistes, proférant des opinions dénigrant les Amérindiens. L'acteur
québécois Roy Dupuis, approché pour participer à la production, avait préféré
ne pas se mêler d'un tel film, comprenant l'importance de son côté
désinformant... Une telle façon de présenter les choses ne peut que modeler
d'une façon regrettable les opinions de gens connaissant peu ou rien de
l'histoire du Canada et des Canadiens francophones.
Il y a aussi le réflexe de la plupart des
immigrants de soutenir le Parti libéral du Canada, formation de centre-gauche prônant
le multiculturalisme, sorte de doctrine réduisant le Canada à une collection
d'individus sans grands liens entre eux, flottant à gauche et à droite comme
des électrons libres, et minimisant la contribution des premiers peuples
canadiens, soient les Amérindiens et les Franco-Canadiens. Le multiculturalisme
voudrait faire croire que le Canada est un genre de réalité postnationale, un
pays réinventé, débarrassé de toutes références à des nations/peuples/tribus,
selon le discours du premier ministre Justin Trudeau. Pourtant, tout cela n'est
que poudre aux yeux. Les Algonquins sont une tribu/peuple/nation, tout comme
les Innus, les Attikamekw, les Inuits, les Agniers (Mohwaks), les Cris, les
Ojibways et tant d'autres, sans oublier les Canadiens français /
Franco-Québécois, Acadiens, Franco-Ontariens, etc.
Nous ne sommes que des tribus, se gaussent
parfois des personnalités d'origine chinoise ou indienne, sur les ondes des
postes de télévision canadiens, sans se douter ou se rappeler que leur propre
pays d'origine est composé lui aussi d'un certain nombre de
peuples/tribus/nations... L'Inde, par exemple, est une mosaïque incroyable de
peuples de toutes sortes, à l'image de l'Afrique noire, véritable chaudron
culturel. Un petit pays comme le Bénin compte de 40 à 44 peuples, contre de 100
à 120 pour le Cameroun ou plusieurs centaines comme le Congo démocratique...
L'idéologie individualiste doit être
combattue, car elle nie une réalité fondamentale, l'existence de liens
culturels ethniques, qu'on le veuille ou non, même en Amérique du Nord. Le post
nationalisme, en soi, n'est qu'une énième tentative à peine voilée de réussir
ce que les anglophones canadiens ont tenté pendant des générations, en fait
depuis un quart de millénaire, réussir à assimiler une bonne fois pour toutes
les Canadiens français et les autochtones, obstacles à la réalisation d'un pays
entièrement anglophone, composé d'individus ne parlant qu'anglais et ne buvant
que du café Tim Hortons...
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