ANGLO-ONTARIANS VS FRANCO-QUÉBÉCOIS

 


La question linguistique et nationale, au Canada, a repris du poil de la bête au cours des dernières années. La situation de Montréal et des autres grandes villes québécoises, menacées d'anglicisation, n'y est pas étrangère, bien sûr.

Le nationalisme québécois est l'héritier du nationalisme canadien-français, bien plus ancien. Ces mouvements peuvent prendre (et ont pris) plusieurs formes au cours du temps, au gré des circonstances et des événements. L'indépendantisme québécois n'est que l'un des aspects de ce besoin ressenti et compréhensible de se défendre contre les pressions anglicisantes qui se font sentir et planent sur notre existence depuis la Conquête de 1759.

Le poids démographique des francophones diminue inexorablement au Canada et les communautés francophones minoritaires hors-Québec sont rongées depuis des lunes par une assimilation de plus en plus galopante. Même un plus grand nombre d'immigrants francophones hors-Québec et une meilleure intégration de l'immigration en terre québécoise ne changera rien à une telle tendance de fond.

Pour le dire simplement, il nous faut plus de pouvoirs. Il nous faut plus de réels pouvoirs politiques, des pouvoirs qui dépassent ceux dévolus à une province canadienne au sein d'un royaume britannique. Il nous faut, A) ou bien tous les pouvoirs (indépendance pure et simple, en bonne et due forme), B) ou bien des pouvoirs supplémentaires (selon la formule république autonome québécoise au sein d'une république candienne, par exemple), notamment en matière économique, culturelle, sociale, linguistique, etc.

Il ne nous manquerait alors que les pouvoirs de nature diplomatique (relations étrangères) et militaire (défense nationale), indispensables à une souveraineté pleine et entière. À l'heure actuelle, les deux partis indépendantistes provinciaux, Québec solidaire et le Parti québécois, proposent la première option. Cependant, le PQ est en perte de vitesse caractérielle et structurelle et l'on peut douter que le courant s'inverse dans l'avenir prévisible. D'un autre côté, QS est trop jeune et manque douloureusement d'expérience pratique au niveau de l'exercice du pouvoir. Les gens qui y militent semblent s'imaginer que d'ventuelles négociations seraient faciles et automatiques: tenue d'états généraux, mise sur pied d'un référendum, le tout suivi de négociations sur les relations entre les deux nouvelles entités souveraines en cas de victoire référendaire.

Ceux et celles qui se souviennent des deux premiers référendums, celui de 1980 et celui de 1995 peuvent douter que cela se fasse aussi facilement que cela. Les risques de dérapage et de dialogues de sourds risquent d'être élevés. Il est fort possible que de telles négociations frappent un mur difficile ou impossible à traverser ou à contourner.

Généralement, un compromis acceptable pour les deux parties vaut mieux qu'une demande absolue qui ne se réalise pas complètement, débouche sur une impasse stérile ou vire même en guerre civile, un conflit que nous ne pouvons évidemment pas gagner au plan militaire, étant donné notre petite taille (un cinquième de la population, grosso modo). Cela étant dit, il peut être utile de changer sa façon de voir les choses. Il ne s'agit pas réellement d'un affrontement entre Canadians et Québécois, ni même entre Anglo-Canadiens et Franco-Québécois, mais d'un affrontement entre Anglo-Ontariens et Franco-Québécois.

Ces rapports de force entre Anglo-Ontariens et Franco-Québécois peuvent prendre plusieurs formes et rien n'interdit, en principe, qu'il soit possible d'aboutir à un compromis favorable à une souveraineté restreinte et non complète, dépendamment des positions prises par les autres groupes vivant en terre canadienne. Cela permettrait au moins de ménager l'avenir, une indépendance incomplète pouvant se transformer éventuellement en autre chose, l'avenir lointain étant impossible à imaginer avec certitude.

Les autochtones, les francophones, les immigrants récents, les immigrants non-britanniques plus anciens, les femmes, les jeunes, les plus éclairés des anglophones ontariens auraient alors à prendre position dans un tel dossier. Les Ontariens d'expression anglaise et les Québécois d'expression française constituent deux forces inégales en termes démographiques, certes, deux power bases de taille bien différente, se comptant en millions de personnes. Pourtant, rien n'empêche la moins nombreuse des deux d'arriver à convaincre les autres groupes de se rallier à elle contre la plus nombreuse. Pour le dire autrement, les Franco-Québécois peuvent possiblement arriver à prendre le dessus sur les Anglo-Ontariens, c'est-à-dire ceux et celles qui sont les descendants des Loyalistes et qui sont les plus attachés à la monarchie britannique, à la couronne britannique et au maintien des liens entre leur mère-patrie et cette contrée improbable qui demeure encore aujourd'hui un royaume canadien n'osant dire son nom et se faisant passant pour une confédération.

Nous ne sommes pas condamnés par la démographie à rester prisonniers d'un royaume canadien ou d'un système britannique pour le reste de nos jours. Il est vrai que nous sommes englobés dans l'empire britannique depuis un quart de millénaire, mais il est encore possible d'en sortir éventuellement, si les astres s'alignent comme il faut.

Dans un tel scénario, les habitants du Canada, le Québec y compris, auraient à décider ce qui leur  importe le plus: la reine d'Angleterre ou l'avenir de cette portion d'Amérique.

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